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Les
Amis du Patrimoine de MOUZON |

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L'industrie textile
dans le Mouzonnais
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Les tisseurs de Douzy
Il y a quelques
années, en observant les maisons centenaires
de la rue des Pêcheurs à Douzy, on pouvait
constater que certaines avaient un air de ressemblance
: deux fenêtres rapprochées au premier
étage ; ces maisons étaient celles d'anciens
tisseurs : les fenêtres du premier étage
étaient nécessaires pour donner un bon
éclairage au métier à tisser manuel
qui occupait une place de choix dans la maison (figure
3). Le soir on éclairait le métier avec
le « quinquet », lampe à pétrole
d'une grande simplicité.
La
rue des pêcheurs, comme d'autres rues de Douzy,
comportait un grand nombre de métiers à
tisser:
-
Un au n°6, un au n° 8 , deux au n°
10 , un au n° 14. en face, on comptait 12 maisons
avec un métier. |

La tisseuse au rouet
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- Au n°10,
Eugène Marolle travaillait avec sa femme pour
les établissements de Montagnac de Lamécourt.
Une à deux fois par semaine, M. Messifet amenait
de Lamécourt, dans sa voiture à cheval,
les ensouples et les fuseaux de laine et ramenait le
drap confectionné les jours précédents.
Charles
Marolle, son fils, en rentrant de l'école (donc
âgé d'environ 10 ans), dévidait
les fuseaux de fil de laine pour confectionner les canettes
qui, mises dans les navettes, permettront au fil de
trame de se dérouler pour former la duite qui
sera ensuite tassée sur l'étoffe contournant
la « poitrinière », au moyen du «
ros » ou peigne. Schéma
du métier à tisser manuel .
C'était
un honneur de travailler pour les De Montagnac «
ça classait le tisseur », ils payaient
bien mais il fallait fabriquer un tissu de qualité.
C'était réalisable si le tisseur y apportait
l'attention nécessaire, car le fil de laine était
régulier. Ce n'était pas le cas de tous
les industriels : « les Juifs » par exemple,
qui payaient mal et fournissaient un fil de mauvaise
qualité entraînant un mauvais canetage,
des casses de fil, un tissage irrégulier, ce
qui diminuait le prix payé au tisseur. |

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«
En 1890, le syndicalisme ardennais, sous l'impulsion de J.B. Clément,
conquiert les métiers les plus réfractaires : les
tisseurs des villages du sedanais » (J.B. Clément -ouvrage
déjà cité). Un jour lorsqu'il vint à
Douzy, il entraîna les tisseurs à la grève :
toutes les ensouples du village furent déroulées et
détruites au milieu de la rue.
Pour éviter
ce genre de désagrément, les établissements
textiles regroupèrent petit à petit les métiers
à tisser dans les ateliers de l'entreprise, transfert qui
devint obligatoire lors de la mécanisation des métiers
à tisser.
Vingt
cinq ans plus tôt, « à la belle époque
» sous Napoléon III, il n'était pas nécessaire
de travailler le lundi, jour de congé hebdomadaire, mais
on travaillait le samedi. Chaque jour à 4 heures de l'après-midi,
tous les métiers de la rue s'arrêtaient : les tisseurs
bavardaient en prenant leur bol de café sur le pas de la
porte.
Par contre,
vers 1910, il était beaucoup plus difficile de gagner sa
vie. Il fallait travailler toute la journée pour gagner peu.
C'était intenable. Eugène Marolle alors âgé
de la cinquantaine arrêta le tissage chez lui et pour gagner
l'argent du ménage rendit des services à la sucrerie
de Douzy (il n'était pas salarié, sa femme n'aurait
jamais permis cette déchéance). La Sucrerie de Douzy
était située à l'emplacement actuel des "Constructions
Mécaniques de Douzy », anciens Ets Cardot.
N.B.-1-
Les renseignements ci-dessus ont été fournis par Clément
Marolle, petit-fils d'Eugène et fils de Charles.
N.B.-2-Le
métier à tisser (figure 4) d'Eugène Marolle
avait un peigne de 100 pouces (254 cm.) et 3 broches au pouce. Il
l'avait rangé précieusement,, avec ses montants, pour
resservir « après la crise ». Les montants de
bois ont servi de bois de chauffage pendant la dernière guerre.
N.B
.-3- Exemple de données nécessaires à la réalisation
du « drap pour costume en laine cardée » tiré
de l'ouvrage « Apprêts des tissus » par Roberts
Beaumont, librairie polytechnique -Paris 1913.
-Laine: Cheviot
-Chaîne: 15 écheveaux, torsion à gauche,
8.5 tours/pouce -Trame: Idem -monté à
6 8 pouces (1. 72 m.) de largeur sur le métier, ros de
13 broches, 2 fils dans chaque broche, 26 duites/pouce.
-apprêté: 56 pouces G .42 m.) de large, 12 onces
(340.2gr) paryard. -Armure: croisé 2/2 (casimir).
-Ordre des opérations de l'apprêt : dénouer
et repriser, dégraisser avec de l'alcali et du savon,
fouler à 57 pouces (1.48 m), laver, étendre et
ramer, et brosser et vaporiser, presser à chaud, vaporiser.
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